Commémoration du 17 octobre 1961, à Nanterre

Je vous fais suivre l’intervention de Jacques Celet, président de la LDH Nanterre, lors de la commémoration du 17/10/1961, ce vendredi 17 à 18h30, devant la plaque commémorative à Nanterre, pour ceux qui n’ont pas pu etre présents.

Je vous annonce aussi que le conseil municipal du 14/10/2008 a voté pour la denomination d’une avenue au nom de cette date, dans les nouvelles terrasses du secteur Seine Arche.

« Le 5 octobre 1961 le préfet de police de Paris, Maurice Papon faisait paraître le communiqué suivant :

« Dans le but de mettre un terme sans délai aux agissements criminels des terroristes, des mesures nouvelles viennent d’être décidées par la préfecture de police. En vue d’en faciliter l’exécution, il est conseillé de la façon la plus pressante aux travailleurs algériens de s’abstenir de circuler la nuit dans les rues de Paris et de la banlieue parisienne, et plus particulièrement de 20h30 à 5h30 du matin. Ceux qui, par leur travail, seraient dans la nécessite de circuler pendant ces heures, pourront demander au secteur d’assistance technique de leur quartier ou de leur circonscription une attestation qui leur sera accordée après justification de leur requête. D’autre part, il a été constaté que les attentats sont la plupart du temps le fait de groupes de trois ou quatre hommes. En conséquence, il est très vivement recommandé aux Français musulmans de circuler isolément, les petits groupes risquant de paraître suspects aux rondes et patrouilles de police. Enfin, le préfet de police a décidé que les débits de boissons tenus et fréquentés par les Français musulmans d’Algérie doivent fermer chaque jour à 19 heures. »

Ce texte à l’apparence faussement anodine, aux accents paternalistes et discrètement menaçants sera à l’origine de la mort de plusieurs milliers de ressortissant Algériens, cette répression constituât un crime d’Etat longtemps couvert par le silence d’une société française qui ne se résout toujours pas à faire la critique de son histoire coloniale.

Pourtant dès le lendemain du massacre des voix s’étaient élevées pour le dénoncer qu’il s’agissent des associations de défense des Droits de l’homme au nom de qui je parle aujourd’hui, dont le MRAP qui intervint dès le lendemain ou des journaux comme Libération ou l’Humanité ,elles ne furent pas entendus.

Commémorer, cela pourrait signifier se souvenir ensemble, réactualiser une histoire vivante pour la soumettre à la critique du présent. La réticence de l’Etat et de la société civile à reconnaître les crimes du 17 octobre 1961 témoigne profondément de ce que l’histoire de la colonisation reste à faire. Cette histoire n’est pas du ressort des seuls historiens : il appartient à la société toute entière de la mener, car la société toute entière est aujourd’hui encore structurée par notre histoire coloniale qui fut un mode particulier de l’exploitation capitaliste qui perdure aujourd’hui mettant en coupe réglée les pays du sud.

La ville de Nanterre, du fait de l’action d’un collectif d’associations et de sa municipalité a joué un rôle précurseur dans la reconnaissance du massacre du 17 octobre 1961, c’est son honneur mais un travail immense reste à faire.

Aujourd’hui à cette même heure un rassemblement a lieu à Saint Michel pour exiger :

– la reconnaissance officielle du crime commis par l’Etat français les 17 et 18 octobre 1961 – la liberté d’accès effective aux archives pour tous, historiens et citoyens – le développement de la recherche historique sur ces questions dans un cadre franco-algérien et international

Car face à un gouvernement qui a tenté d’inscrire dans la loi l’obligation de reconnaître les bienfaits de la colonisation ,sans succès grâce à la mobilisation des associations que je représente et qui travail à la réhabilitation, en leur rendant des hommages officiels, des criminels de l’OAS, dont les héritiers s’installent hélas dans une rue de Nanterre qui s’appelle toujours la rue des Suisses, tout en réduisant la place des cours d’histoire au lycée. L’appropriation par tous de l’histoire est devenue un combat.

Ceux qui organisent un sommet international sur l’immigration à Vichy en connaissent l’enjeu, la droite décomplexée l’est au prix de l’oubli.

Oubli du racisme d’état (expression de Michel Foucault reprise par Olivier Lacour Grandmaison) qui s’est imposé pendant la période coloniale, oubli du code indigène de 1881 qui séparait les citoyens français bénéficiaires des lois de la république et les « indigènes » soumis a une législation d’exception.

Car si la mémoire nous revenait, nous pourrions constater de bien étranges similitudes entre la manière dont l’état coloniale se comportait avec ceux qu’il nommait les « indigènes » et les pratiques actuelles de l’état français.

Le colonialisme a la vie dure, il continu de diffuser son poison dans la France du XXI eme siècle. Les étrangers sont toujours soumis à une législation d’exception. Les sans-papiers qui mènent un combat pour l’accès au droit le dénoncent par leur mouvement. Et le collectif des oubliés de Saint Paul nous le rappele. La fréquentions assidu des locaux du service des étranger laisse un doute sur la nature du lieu ou l’on se trouve, préfecture de la république ou palais d’un gouverneur colonial ? seul un traitement humain des dossiers présentés permettra de lever le doute. »

3 réponses
  1. le pacifiste
    le pacifiste dit :

    j’aivais fait un petit mot sur ce sujet qu’en est t’il des autres interventions… des oranges et du maire adjoint ? oubli volontaire ou sectarisme…. dans ce cas ce serai dommage que je m’exprime sur d’autres blogs….

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  2. H2B
    H2B dit :

    Je suis juste membre de la LDH, et j’ai participé à l’ecriture du texte, et je l’ai mis en ligne sur mon blog…sectarisme est un mot que je ne connais pas. Faites moi suivre votre mot et votre nom et je le mettrais en ligne, je suis sure que c’est un texte plein d’humanité et d’ouverture. Quand aux autres interventions elles sont aussi les bienvenues, la raison pour lesquelles je ne les ai pas mis en ligne est que personne ne me les a transmis 🙂 et oui, M. Le maire et Mahmed ne m’ont rien transmis oubli volontaire ou sectarisme? Vous avez aussi oublié de parler de l’intervention de Yacine, puisqi’il ne faut oublier personne…. Malheureusement, je ne suis pas dotée d’une mémoire extraordinaire pour réécrire mot pour mot les interventions que j’ai entendu….et c’est bien dommage, donc vous savez ce qu’il vous reste à faire…

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  3. Gérard PERREAU-BEZOUILLE
    Gérard PERREAU-BEZOUILLE dit :

    Mais personne ne me l’a demandée, La voici bien volontiers…. INTERVENTION DE Gérard PERREAU-BEZOUILLE Premier adjoint de Nanterre vendredi 17 octobre 2008 17 octobre 1961 Nous sommes alors en pleine guerre d’Algérie – et je rappelle que ce terme de guerre n’est pas avancé officiellement-. Les dernières heures d’une certaine France coloniale arrivent. Une manifestation pacifique d’algériens résidents en France, s’opposant au couvre-feu qui leur était imposé, est férocement réprimée par la police française. Sous les ordres du préfet de Paris, Maurice Papon, la police interpelle, charge, agresse, blesse et tue. 10 000 manifestants algériens seront arrêtés, plusieurs centaines de morts et de disparus, jetés dans la Seine. Dans les jours qui suivent, des arrestations viendront, notamment dans les bidonvilles de Nanterre. Ce souvenir des victimes de cette violence d’Etat et de cette page de l’Histoire de France, 47ans après, est important à plusieurs titres. Il s’agit tout d’abord de réparer l’affront fait à ces victimes et aux familles de ces victimes. Se souvenir ensemble, aujourd’hui, c’est redonner la parole confisquée à l’époque. Au lendemain de la manifestation et de cette répression sanglante, rares sont les journaux qui ont fait état de ce qui s’est passé. Mis à part l’Humanité et Libération de Raymond Aubrac, les autres médias relaient la version ‘’officielle’’, 3 morts et des policiers qui se sont défendus face à des manifestants agressifs, la plupart se félicitent de l’action de la police. Se souvenir aujourd’hui, c’est aussi se rappeler et affirmer haut et fort ce triste passé colonialiste de la France. Pendant plusieurs décennies, la mémoire collective, soumise au discours officiel de l’Etat, n’a jamais pleinement admis que la France était un Etat administrant et exploitant les ressources de pays entiers au mépris du droit à l’autodétermination des peuples, que la République française légitimait une hiérarchie des groupes et populations, entre citoyens français et indigènes, entre colons et colonisés. Ce triste héritage doit être reconnu et partager pour avancer aujourd’hui. Car la France n’a toujours pas digéré son passé, son Histoire. En 2005, il était honteusement question de reconnaître, par un texte législatif, le « rôle positif de la colonisation ». Les atrocités commises pendant la guerre d’Algérie, la torture, la répression des Algériens de France… tous ces sujets restent encore tabous dans notre pays. Le chemin apparaît même long pour qu’ils soient évoqués dans les manuels scolaires. De même, les discriminations liées à l’origine, les violences et les bavures policières, les ségrégations territoriales, les inégalités sociales sont toujours d’actualité. Et ce sont les villes de banlieues, les quartiers populaires, les jeunes de ces quartiers et les enfants héritiers de l’immigration qui en souffrent le plus directement. Afin d’éviter que ces pratiques perdurent, il faut se remémorer les heures tragiques de l’Histoire de France, et ces événements du 17 octobre 1961. Commémorer ces faits historiques, c’est enfin se souvenir de l’histoire de Nanterre, terre d’accueil pour les différentes vagues d’immigration, et notamment pour le peuple algérien. Nanterre, Ville populaire et de migrations, c’est par exemple dans notre ville, qu’en 1937 Messali Hadj enregistre les statuts du parti du peuple algérien. C’est de Nanterre que de nombreux manifestants partent ce 17 octobre 1961. C’est dans les cités, les quartiers, associations et usines, que des générations d’habitants ont appris à se connaître et à construire ensemble l’identité de la ville. Nombreux sont les Nanterriens qui s’engagent, dès 2001 ils signent l’appel national, plus de 500 signent l’appel nanterrien. La municipalité En écho du travail de sensibilisation et de mobilisation mené par un grand nombre d’associations, l’équipe municipale a pris la responsabilité, en 2003, de poser la plaque commémorative devant laquelle nous sommes réunis actuellement. Depuis, nous avons fait en sorte que cet événement ne soit jamais oublié, qu’il soit même rappelé chaque année ; nous souhaitons qu’il soit enseigné dans le futur. Un nouveau moment important est prévu avec la décision prise lors du dernier conseil municipal de dénommer une artère de Nanterre « boulevard du 17 octobre 1961 ». Nous souhaitons que son inauguration, l’année prochaine, soit l’occasion d’un temps fort et que de multiples initiatives soient prises à cette occasion, avec l’ensemble des associations, des militants et des citoyens, impliqués dans la commémoration de cet événement et dans le devoir de mémoire. Travailler la mémoire aide à construire du « nous », à nous retrouver autour d’une humanité commune, d’un destin de vie partagé. Nous retrouver pour que le double héritage « populaire et immigration » soit enfin reconnu comme un facteur positif et légitime de l’évolution de notre pays. Pour finir, je voudrais saluer le consul d’Algérie à Nanterre, présent parmi nous, ce soir. Je voudrais également saluer l’ensemble des associations qui se sont jointes à la commémoration et qui connaissent l’engagement municipal pour que ces événements soient rappelés de manière commune. Je voudrai aussi remercier tout particulièrement, les témoins directs de cette époque, Messieurs Guenad, Telhaoui, Rasjebel et tous les autres, qui, année après année, sont au rendez-vous à cette date anniversaire. Merci à tous de votre présence.

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